"Les grands voyages ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant le départ même.
On ouvre les atlas, on rêve sur les cartes. On répète les noms magnifiques des villes inconnues."

Joseph Kessel

jeudi 20 octobre 2011

Croisière à l'africaine

Un vendredi matin à Monkey Bay, au bord du lac Malawi... Ce n'est pas un minibus que nous attendons mais un bateau. Véritable institution, le ferry MV Ilala écume les eaux du troisième plus grand lac africain depuis plus d'un demi-siècle et assure une liaison hebdomadaire (dans chaque sens) entre les principaux ports du Malawi (il fait même un arrêt au Mozambique). C'est aussi le seul moyen (économique) de se rendre sur les îles de Likoma et Chizumulu. Nous avons en effet décidé de partir à la découverte de la plus grande des deux, Likoma, et de nous "couper" ainsi du monde pendant une semaine.

Embarquement à Monkey Bay
Le ferry est aussi célèbre pour ses retards. En effet, si l'on sait quand il part, on ne sait jamais exactement quand il arrive (c'est l'Afrique après tout). Mais pour l'heure, nous embarquons à peu près dans les temps. Nous nous attendions à un petit ferry hors d'âge comme ceux qui coulent de temps en temps au large des côtes africaines mais rien de tout cela. Si le MV Ilala a ses plus belles heures derrière lui, c'est tout de même un bâteau imposant avec ses 3 niveaux et un faux air de paquebot de la grande époque. Comme notre "croisière" doit durer au moins une trentaine d'heures, nous optons pour la 1ère classe qui nous donne accès au pont principal que nous partageons avec deux autres touristes. Ici pas de cabine, ni de chaises longues, le vrai luxe, c'est l'espace et la tranquillité. Et nous saurons le savourer au fur et à mesure que les niveaux inférieurs se remplissent. Des passagers bien sûr, mais surtout des sacs, des meubles, des poules, etc. Les chargements et déchargements sont sans aucun doute la principale attraction de la traversée.

Jamais à vide!
A chaque arrêt, c'est le même spectacle de la foule immense qui se presse au bord du quai à l'approche du ferry, des vendeurs à la sauvette qui proposent boissons et snacks pour supporter la longue attente (le bâteau arrive toujours avec plusieurs heures de retard voire parfois un jour entier en fin de parcours) et puis les curieux bien sûr, beaucoup de curieux. Après tout, le passage du MV Ilala deux fois par semaine est pour beaucoup la principale occupation de la journée.
Pour nous, la traversée se résume surtout à lire, discuter avec nos compagnons de voyage et surtout attendre l'heure des repas, que nous prenons dans la cantine du personnel à laquelle nous avons accès en tant que passagers de première classe. En seconde classe, c'est nsima à tout les repas. Nous avons droit au classique poulet (ou poisson) - riz. Le voyage est plutôt agréable même si ça tangue pas mal (mais pas de malade à bord). Le soir, nous louons un matelas de mousse et passons la nuit à la belle étoile dans notre sac de couchage. Le bonheur. La deuxième journée est longue, comme prévu! Nous arrivons finalement à destination à 22h au lieu de 13h, soit neuf heures de retard. Ou neuf heures de croisière en plus, selon les points de vue...

The Lake Ferry was a welcome break from the usual minibus travel. The MV Ilala has run up and down the lake - which is the third largest in Africa - once a week for more than fifty years, stopping at the main Malawian ports (and even in Mozambique). This is also the only (affordable) access to the islands of Likoma and Chizumulu. We had decided to "get away from it all" during one week and explore the biggest one, Likoma Island.
The ferry is not known for its punctuality. You usually know when it leaves but can't know for sure when it's going to arrive (but this is Africa). We left quite on time though. We were expecting one of these very old and crowded boats but it was actually not that bad and the ferry was still in reasonable condition. As the journey to the island takes at least thirty hours, we decided to travel "first class", which on the Ialala means nothing more than staying on the breezy, uncrowded upper deck and using the communal showers and toilets. But we really enjoyed it, especially as the lower deck was getting more and more crowded after each stop. One of the highlights of the trip was to watch passengers and goods such as furniture or chickens being transported on smaller boats (as the bays are often too shallow) to the ferry at each port. Or vendors selling food and drinks. The arrival of the boat is also a popular attraction for locals.
We spent most of the time reading, chatting with other travellers and waiting for meals (served in the ferry's restaurant and consisting of chicken or fish and rice). It was very windy and there was quite a little bit of rolling on the boat but everyone was fine! We hired a mattress and spent the night on the deck under a fantastic night sky. The second day was a long one as we arrived at 10pm instead of 1pm. Nine hours delay. Or nine hours more to enjoy the cruise, depending on how you look at it!

Incontournable safari

Nous voilà en Afrique depuis un mois maintenant et toujours pas le moindre animal sauvage en vue (il y a bien quelques oiseaux qui sortent un peu de l'ordinaire mais qu'en est-il des grands animaux emblématiques des documentaires animaliers?). Il faut dire qu'ils ont eux aussi pas mal souffert des conflits dans la région (comme la guerre civile au Mozambique) et bien sûr du braconnage. Pas vraiment intéressés par le principe même du safari (plusieurs heures dans un véhicule tout-terrain avec d'autres touristes) et un peu sceptiques quant à la notion même de parc national (zoo qui ne dit pas son nom?), nous décidons quand même de tenter l'expérience. Le parc national de Liwonde n'a certes pas l'envergure et la renommée des plus grands parcs africains (il fait seulement 50km de long sur 15km de large et n'abrite pas de grands fauves) mais il est très facile d'accès, très abordable et bizarrement peu touristique. Notre pied à terre pour ces quelques jours de "brousse" sera le Liwonde Safari Camp, situé à la limite du parc. L'absence d'électricité est compensée par le cadre (au milieu des baobabs centenaires voire millénaires) et les délicieux repas pris en commun.

Un très vieux baobab
Et puis, première constatation: on voit presque plus d'animaux sur place que dans le parc. Il y a en effet une rivière juste à côté du Safari Camp et puis, en cette fin de saison sèche, c'est une des rares zones encore relativement vertes. Après une petite marche de quinze minutes, voici donc nos premiers babouins, phacochères, antilopes et surtout - clou du spectacle - éléphants.

A quelques pas du Safari Camp
Il y a les animaux qu'on voit mais aussi ceux qu'on entend, une fois la nuit tombée (comme les hyènes et les hippopotames). Et ceux qui s'invitent en nombre chaque nuit dans le campement: les éléphants! Le premier soir, ils étaient apparemment une cinquantaine. Ceci dit, personne n'est sorti pour vérifier... Ces petites bêtes là imposent le respect. Les clôtures électriques n'y font pas grand chose, les éléphants détruisent tout sur leur passage et pour s'en convaincre, il suffit de voir les traces laissées sur le tronc de certains baobabs. En tout cas, très impressionnant de les entendre manger à quelques mètres seulement des tentes. Nous ne les reverrons pas durant notre safari à l'intérieur du parc mais buffles et antilopes viendront compléter le tableau.

Pas de grands fauves mais de nombreuses antilopes

We had been in Africa for one month and had not spotted any of the famous game species yet. So we decided to go for the classical african experience - the safari - even though we didn't relish the idea of hours in a 4WD with other tourists and were not quite sure about the difference between a wildlife reserve and a big zoo. The Liwonde National Park is a relatively small park, only 50km long and 15km wide, and may not be the most popular one in Southern Africa (no big predators there) but it is very accessible, affordable and surprisingly underrated. We stayed at the Liwonde Safari Camp, just outside the national park. There was no electricity but the lanterns made the place very atmospheric after dark. We soon realised there were a lot of animals to be seen around the camp. It was the end of the dry season and the camp was one of the few green places left in the whole area so a lot of animals were coming to graze and drink at the river during the day. After a fifteen-minute guided walk, we had already spotted baboons, warthogs, antelopes and our first elephant. Then, there were the animals you could hear after dark (such as hyenas and hippos). And those who were visiting the camp every night: elephants! There were probably fifty of them but no one went out to check... It is very impressive to hear them eat just outside of your bungalow. And you can tell they were here just by looking at the baobabs! We didn't see the elephants inside the park during the game drive but were lucky enough to spot buffaloes and rare antelopes.

Nous prenons un peu de hauteur

Petit pays, le Malawi étonne pourtant par sa diversité. Pour mieux nous en rendre compte, et avant de rejoindre le lac, nous partons à l'assaut du massif de Mulanje. Surgi comme de nulle part (géologiquement parlant issu d'un point chaud), il impressionne par ses versants très abrupts et culmine à un peu plus de 3000m d'altitude. Sur les pentes les plus arrosées, des plantations de thé à perte de vue et encore quelques traces de forêt primaire.

Champs de thé à perte de vue
En deux jours, pas le temps de s'attaquer aux sommets mais nous voulons rejoindre les hauts plateaux (situés à 2000m) et passer la nuit dans un des nombreux refuges avant de redescendre. Comme souvent en Afrique, il faut prendre un guide ou bien un porteur (qui connaît lui aussi parfaitement le chemin). Le choix est vite fait et pour seulement 5€ par jour pour un porteur, on est bien loin des tarifs astronomiques pratiqués en Tanzanie! Tout est organisé en cinq minutes et il nous faudra à peine plus de temps pour régler les derniers achats au supermarché local. L'ascension, assez raide par endroits, nous prendra une bonne partie de la journée. Il faut dire que notre porteur (guère plus haut que le sac) n'a pas vraiment le gabarit idéal pour porter nos 20kg (condensé de nos deux sacs) - mais plein de bonne volonté - et du coup, les arrêts sont très fréquents!

Notre porteur (sans sac)
La faune locale se fait assez invisible mais l'intérêt de la rando est ailleurs: les nombreux points de vue tout au long du parcours et surtout, les hauts plateaux, assez austères et tellement éloignés des clichés africains.

Sur les hauts plateaux
Les nuits y sont assez fraîches en cette saison et à cette altitude, pas besoin de moustiquaire! Une fois de plus, pas de touriste en vue et pas trop difficile dans ces conditions de se répartir les lits. Le refuge n'a bien sûr pas l'électricité mais nous sommes accueillis avec une bassine d'eau chaude (pour une bonne douche) et un feu de cheminée. Des petits plaisirs que nous savons apprécier, particulièrement depuis le Lesotho!

There is more to Malawi than a lake so before heading there, we decided to take a couple of days to explore the Mulanje massif, the premier hiking destination in the country. This spectacular massif consists of a plateau set at an average elevation of 2000m and numerous peaks, the highest one at 3000m. There are vast tea estates on its slopes, as well as some forested areas. Two days was not enough time to tackle the peaks but we wanted to reach the plateau and spend the night there in one of the mountain huts, then descend on the second day. It is compulsary to arrange either a guide or a porter (who also knows the way). So for 5€ a day, we hired a porter! Ridiculously cheap compared to the treks in Tanzania for example. Everything was set up in five minutes but we still had to stock up at the local supermarket.
The ascent was quite steep and took us most of the day as our porter had to stop very often to catch his breath. He was a short guy and probably not the most appropriate person to carry our 20kg backpack!
We didn't spot many animals on this hike but the views along the way were really impressive and so was the plateau. Nights are quite chilly at this time of the year and the good thing is that you don't need a mosquito net up there. The hut itself was comfortable even though there was no electricity. We were the only tourists staying there. We were brought a bucket of hot water (to take a shower) and had a nice cooking fire prepared for us. That is luxury!

Des souris et des hommes

Le Malawi est parfois appelé "the warm heart of Africa", le coeur chaleureux de l'Afrique, en hommage à la gentillesse de ses habitants et notre première impression ne fait pas mentir le dicton. Dès le passage de la frontière, on note un changement. Il est déjà plus facile de communiquer dans cette ancienne colonie britannique où tout le monde parle anglais mais ce n'est pas tout. Les gens semblent plus curieux, ouverts et optimistes. On vient nous serrer la main, échanger quelques mots avec nous. Rien à voir avec les mozambicains, certes accueillants, mais plutôt timides et qui paraissaient parfois porter la misère du monde sur leurs épaules.
Blantyre, la seconde ville du pays, n'a pas grand chose à offrir au touriste de passage mais c'est malgré tout un pied à terre plutôt agréable pour ces premiers jours au Malawi. Et puis, nous qui avions manqué la floraison des jacarandas à Prétoria, nous voilà servis! Ils sont partout dans la ville et lui donnent un cachet bien particulier. Jugez-en par vous-mêmes!

Centre-ville de Blantyre
C'est aussi l'occasion pour nous de diversifier un peu nos repas. Ethiopien, indien, chinois, les restaurants de Blantyre sont assez chers et surtout destinés aux expatriés du coin mais ça change du poulet-riz ou poulet-nsima (appelée xima au Mozambique, c'est cette semoule de maïs qui accompagne la plupart des repas).
Autre alternative culinaire: les petits snacks qu'on trouve dans les campagnes au bord de certaines routes. Nous avons testé les brochettes d'oiseaux (pas mauvais) mais pas les souris (il y a quand même des limites!).

Une petite brochette pour la route?

Malawi is sometimes called "the warm heart of Africa" and we soon realised after crossing the border that there was something different about this country. Of course, it is easier to communicate in this former British colony as almost all Malawians speak English fluently. But they also seem to be fairly easygoing and friendly towards foreigners. Not that Mozambicans were not welcoming! But they were usually more distant and shy. Malawians, on the other hand, launch quite easily into questions or conversation.
Blantyre, Malawi's second-largest city, does not have much in the way of tourist attractions but it is a pleasant place with a compact central area. And we got to see there the flowering jacarandas we had missed in Pretoria. They are everywhere in the city and give it a unique charm. 
This was also the opportunity for us to sample a different restaurant every night (such as ethiopian, indian and chinese) and although restaurants in Blantyre are quite expensive and usually full of expats, it was a nice change from the usual chicken and rice or chicken and nsima (also called xima in Mozambique, it is a porridge made from maize meal and served everywhere). By the way, you can also buy some interesting snacks on the roads in Malawi: grilled little birds on a stick (quite tasty actually) or even mice!

Il y en a un qui se régale!

mardi 18 octobre 2011

Changement de cap

Après six plongées à Tofo, il est temps de reprendre la route vers le nord. Pas trop grave puisque notre étape suivante est également une destination plongée! Après un petit passage par la capitale provinciale - pleine de charme - Inhambane et un de ces longs voyages africains si peu confortables (durant lequel nous passons la ligne symbolique du Tropique du Capricorne), nous arrivons à Vilankulo. Cette petite ville côtière est plutôt décevante, il n'y a même pas pas de plage à proprement parler mais c'est le passage obligé pour rejoindre l'archipel de Bazaruto. Un petit paradis tropical, accessible seulement la journée pour le commun des mortels car les quelques hébergements qu'on trouve sur place sont tous des hôtels de luxe (les "lodges", un concept assez répandu en Afrique), pas vraiment dans notre budget!
Pause déjeuner sur l'île de Bazaruto
Nous nous consolons quand même en faisant un arrêt sur une des îles entre deux plongées. Et c'est vrai qu'elles sont splendides. Sable fin, eau cristalline, un vrai décor de carte postale! La plongée est sympa aussi: des tortues pas farouches du tout, des raies qui nous font un ballet sous-marin et de magnifiques coraux.
Plongée à Two Mile Reef
Nous avions prévu de longer la côte du Mozambique jusqu'à Pemba mais (premier) changement de programme. Les distances étant assez considérables (trois à quatre jours pour rejoindre le nord du pays) et le transport assez pénible (surtout quand on a des grandes jambes et des gros sacs à dos), nous décidons de nous enfoncer dans les terres et de filer plein nord. Première étape sur la route du Malawi: Chimoio et ses collines verdoyantes. Puis, changement de décor, le paysage se fait beaucoup plus aride, les baobabs sont omniprésents, nous traversons la province de Tete et le célèbre fleuve Zambèze (encore tout un symbole). La frontière n'est plus qu'à deux heures de route!

After six dives at Tofo, it was time to continue northwards and head to our next stop, which was also a diving destination. After a stopover in the charming provincial capital (Inhambane) and one of these long and tough african journeys on a bus (we crossed the Tropic of Capricorn), we arrived at Vilankulo. This sleepy coastal town is quite uninspiring and doesn't have a proper beach but it is the gateway for visiting the nearby Bazaruto archipelago. A tropical paradise only accessible during the day as there is no budget accomodation on the islands. There are only a few upmarket lodges, nothing for those who have limited purse strings! But we got to see one of the islands between two dives. Clear turquoise waters, white sand, they are truly amazing! Diving there is also very good with lots of turtles, rays and colourful reefs.
We had planned to stick as long as possible to the coast but because of the long distances (at least three or four days to get to the north of the country) and the less than comfortable bus rides (with a big backpack on your knees!), we decided to head straight to Malawi. We stopped at Chimoio (green hilly area) and crossed dry and dusty Tete province (dotted with huge baobab trees) and the famous Zambezi river. The border was only a two-hour drive away!