"Les grands voyages ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant le départ même.
On ouvre les atlas, on rêve sur les cartes. On répète les noms magnifiques des villes inconnues."

Joseph Kessel

lundi 5 décembre 2011

Au pied des géants

Peu de treks comme le tour des Annapurnas permettent de côtoyer certains des plus hauts sommets du monde pendant deux semaines et de dépasser les 5000m d'altitude sans difficulté technique ou logistique particulière. La choix de la deuxième quinzaine de novembre s'avèrera judicieux pour échapper aussi bien à la foule qu'à la neige. Pour atteindre le point de départ du trek, à 800m d'altitude, il faut d'abord huit heures interminables de bus sur une route périlleuse. Les premiers jours de marche nous font suivre un chemin bien balisé qui remonte progressivement une vallée jusqu'au village de Manang, situé à 3500m. Nous voyons défiler les paysages au fur et à mesure que nous prenons de l'altitude. Nous passons d'abord entre rizières en terrasse et bananiers avant de traverser des forêts de bambous, de feuillus puis de sapins et d'atteindre les zones d'altitude où paissent les yaks. C'est à Manang que les choses sérieuses commencent. Le village suivant étant situé à plus de 4000m, il est en effet vivement recommandé d'y passer une journée d'acclimatation afin d'éviter d'éventuels troubles liés à l'altitude. Pas vraiment une journée de repos, il s'agit au contraire de gagner un maximum d'altitude dans la journée et de redescendre dormir au village. L'occasion pour nous de découvrir un lac (partiellement) gelé à 4600m et surtout l'une des plus belles vues du trek sur le massif des Annapurnas. 

Annapurna III et glacier du Gangapurna
Le moment fort du trek et la motivation de chaque randonneur, c'est le passage du col du Thorong La, situé à 5416m. L'ascension se fait en trois courtes journées de marche pour ne pas gagner trop d'altitude à la fois mais il ne faut pas s'y tromper, ce sont des étapes assez physiques: le pas devient lent, le souffle court et les nuits extrêmement fraîches, surtout celle au High Camp, à 4900m (plus haut que le Mont-Blanc). Nous franchissons le col le dimanche 27 novembre à 8h48, morts de froid mais heureux! 

Preuve à l'appui: passage du Thorong La, 5416m
 La vue n'est pas particulièrement impressionnante mais le sentiment d'accomplissement est grisant et se lit sur tous les visages. Le passage du col ne marque en aucun cas la fin de la journée mais le début d'une descente vertigineuse jusqu'au premier village à l'ouest. C'est déjà pour beaucoup de marcheurs la fin du voyage depuis la construction de la route. Pour nous, il reste encore une petite semaine de marche sur des sentiers désertés, au coeur de paysages époustouflants comme les hautes vallées désertiques du Mustang qui ne voient jamais la pluie. Les points forts de la seconde partie du trek sont le magnifique village blanc de Marpha, le glacier du Dhaulagiri (sixième plus haute montagne du monde) et petite récompense, les sources chaudes de Tatopani (idéal pour les jambes fatiguées).

Paysage de vallée au-dessus de Tatopani
Il nous faudra finalement seize jours pour parcourir le circuit dans son intégralité. Toutes les conditions étaient réunies pour un trek inoubliable: soleil omniprésent et soucis logistiques réduits au minimum. Nous avions choisi de faire le trek sans guide ni porteur. Il était après tout bien difficile de se perdre et nous avons eu peu de mérite à porter nos sacs chaque jour car nous n'emportions ni tente ni nourriture. Le chemin est en effet jalonné de lodges où nous étions logés chaque soir pour des sommes dérisoires dans des chambres basiques. En contre-partie, les repas (délicieux) y sont chers et les prix vont jusqu'à doubler dans les zones les plus reculées. Mais nous avons joué le jeu avec plaisir tellement il est agréable de prendre un bon repas après une longue journée d'effort et nous avons été impressionnés par ces cortèges de porteurs locaux qui approvisionnent les villages de proche en proche depuis la route, parfois située à plusieurs jours de marche. Nous avons été heureusement surpris de voir que tout est mis en oeuvre pour minimiser l'impact écologique de notre passage: recharges d'eau potable disponibles dans presque tous les villages d'altitude, douches solaires (mieux vaut arriver tôt pour avoir de l'eau chaude), utilisation du bois de chauffage minimisée (pas de chauffage dans les chambres, seulement quelques heures dans la pièce commune). 

Porteur de tout et n'importe quoi sur le trek
Few treks like the Annapurna Circuit offer spectacular high mountain views and allow you to go above 5000m without technical difficulty or special logistics. The choice of the second half of November turned out to be a good one as we managed to escape the crowd as well as the snow. To reach the starting point of the trek, at 800m above sea level, it took us eight long hours by bus on a dangerous road. The first few days, the well-marked trail followed a valley gradually uphill to the village of Manang, located at 3500m. The trek is amazing because you get to see different lanscapes as you gain altitude: terraced rice fields, banana trees in the lower parts, then bamboo and pine forests and yak pastures in high mountain areas. It is in Manang that the real fun began. The next village was located above 4000m so it was highly recommended to spend an acclimatization day there before pushing on in order to avoid possible problems related to altitude. Not really a rest day. On the contrary, this was all about gaining altitude during the day and returning to Manang to sleep. We hiked to the Ice Lake at 4600m and the view of the Annapurna Range up there turned out to be one of the best of the trek.
The highlight of the trek and motivation of each hiker is the Thorong La pass, at 5416m. The ascent is done in three short days to avoid gaining too much altitude at a time but don't be mistaken, these are quite strenuous days: the pace is slower, you're sometimes breathless and nights up there are really cold, especially the one at the High Camp, at 4900m (higher than Mont Blanc). We reached the pass on Sunday, November 27th at 8.48am, freezing but happy! The view was not particularly impressive but the sense of accomplishment was exhilarating and could be read on every face. The pass marked by no means the end of the day but the beginning of a steep descent to the nearest village to the west. It is where many hikers end their trip as they take advantage of the new road but we wanted to walk the entire circuit and still had a week on deserted trails among breathtaking scenery such as the high desert valleys of Mustang that never see the rain. The highlights of the second part of the trek were the beautiful whitewashed stone village of Marpha, the Dhaulagiri glacier (the sixth highest mountain in the world) and last but not least, the hot springs of Tatopani (ideal for tired legs).
It took us sixteen days to walk the entire circuit. We had a perfect weather and minimal logistical concerns. We chose to trek without a guide or porter. It was after all very difficult to get lost and we had little merit to carry our backpacks every day because we didn't have any tent or food. There was accommodation all along the way (lodges) where we could stay every night for a pittance (usually one euro) in basic rooms. The meals were expensive (for local standards) and the prices would double up in the most remote areas. But it was nice anyway to get a delicious meal after a long day of effort and we were impressed by all the locals we saw on the trails carrying all kinds of goods on their back to supply remote villages from the road. We were also pleasantly surprised to see that a lot is done to minimize the environmental impact of tourists: refillable drinking water available in many villages, solar showers (it's better to arrive early though to get hot water) and use of firewood minimized (no heating in the rooms, only a few hours in the common room).

La vallée des temples

L'arrivée en avion au Népal offre une vue imprenable sur la chaîne himalayenne et ses sommets enneigés. Il nous tarde de partir randonner avant que le froid hivernal ne s'installe et que la neige ne vienne recouvrir le principal col du trek. Mais avant cela, Katmandou est une étape incontournable. 

Vieille ville de Patan dans la vallée de Katmandou
C'est une ville surprenante, mélange de couleurs et de cultures mais c'est surtout la juxtaposition d'ancien et de moderne qui étonne. Les temples et palais du Moyen-Age sont éparpillés dans une ville chaotique et surpeuplée. La richesse de l'architecture du 17ème ou 18ème siècle tranche avec les constructions modernes hasardeuses qui poussent vers le ciel. Nous passons ainsi plusieurs jours à déambuler dans les ruelles envahies de marchandises, de piétons et de véhicules en tout genre, à la découverte des temples aussi bien hindous que bouddhistes qui parsèment la ville. Ajoutez à celà la multitude des dieux hindous, la complexité de l'imagerie religieuse et la surperposition des deux croyances qui marquent la culture népalaise et l'affaire devient vite très complexante pour le touriste néophyte. 

Bouddha en méditation
Les démarches d'obtention du visa indien, qui prendront une semaine et nous coûteront quelques séances d'attente interminables, prolongent notre séjour dans la capitale et nous en profitons pour visiter l'ancienne ville royale de Patan, un temple bouddhiste envahi par les singes et les touristes ainsi que le complexe hindou de Pashupatinah, situé au bord d'une rivière sacrée, où nous assistons à notre première crémation.
Nous découvrons aussi avec plaisir la richesse de la cuisine népalaise qui associe saveurs tibétaines et indiennes, et pour quelques roupies, nous nous régalons de momos, ces délicieux ravioli à tremper dans une sauce au curry, de daal bhat, riz blanc servi avec une soupe aux lentilles et un curry de légumes et des thukpas, copieuses soupes de nouilles. Nous redécouvrons une diversité culinaire qui nous avait manquée en Afrique. Une fois le plein de culture fait et nos estomacs rassasiés, nous quittons la grisaille et le vacarme pour rejoindre les hauteurs.

Délicieux momos
Before we landed in Nepal, we got an amazing view of the Himalayan range from the aircraft. We couldn't wait to go hiking before it got too cold and snowy on the trail. But we were to spend a few days in Kathmandu first, a perfect introduction to the country.
It is a fascinating city, a mix of colours and cultures, of old and new. Medieval temples and palaces are spread out in the chaotic and crowded streets of the old town. The architectural monuments from the 17th and 18th centuries couldn't contrast more with the modern sprawling buildings. We spent many days wandering around the backstreets and courtyards full of shops and motorcycles and exploring the numerous Hindu and Buddhist temples. It is easy to get lost though with the huge number of Hindu gods, all the religious symbols and the fact that in Nepal, Hinduism and Buddhism have a lot of common features (followers of both religions often pray at the same temple). It took us one week to get the Indian visa so we used the opportunity to take a few side trips such as the old royal city of Patan, the "Monkey Temple" and the Hindu complex of Pashupatinah which stands on the banks of a holy river and where we witnessed a cremation.
We ate like kings in Kathmandu and sampled the local dishes - even though most of them are actually either Indian or Tibetan - for a few rupees: momos (delicious dumplings dipped in a a spicy sauce), daal bhat, the staple meal (rice, lentil soup and curried vegetables) and thukpas (thick noodle soups). A culinary diversity that we had missed in Africa! Once we had enjoyed the culture and the food, we left the chaos and grey skies and headed to the mountains.